les différents styles de calligraphie
La calligraphie islamique renferme une variété de styles et de méthodes ainsi que divers instruments que l’on appelle kelk, khatt ou qalam. Cet art continue d’occuper une place importante dans la majorité des pays musulmans. Nous présentons ici les styles calligraphiques les plus importants.
Style coufique (koufi) : ce style est apparu et s’est développé dans la ville de Koufa (Irak) dont est issu son nom. La taille des lettres les unes par rapport aux autres est organisée selon un système de points. Le style coufique comporte les points diacritiques (c’est-à-dire les points que l’ont met sur certaines lettres de l’alphabet arabe) ainsi qu’une vocalisation, cependant, dans la plupart des textes écrits dans ce style, seules les lignes des lettres sont calligraphiées sans points diacritiques. Les premiers Corans ont étés écrits dans ce style. Avec l’arrivée du style naskh et des autres styles, notamment iranien, le style coufique a eu tendance à être progressivement abandonné.
- Style coufique, calligraphie de la sourate "Mohammad".
Style bannâ’i ou ma’gheli : ce style de calligraphie islamique est l’une des variétés de style coufique à angle et est obtenu en dessinant des figures géométriques telles que le carré, le triangle, le rectangle, ainsi que des lignes parallèles et perpendiculaires. Le stylebannâ’i est un style non ornementé et géométrique issu du style coufique, qui a été créé sur la base de carreaux. La base de ce style consiste ainsi en des lignes verticales et horizontales d’une épaisseur unique qui se croisent de façon à ce que les lignes du motif calligraphique occupent l’ensemble de la surface lui étant allouée.
Le mot bannâ’i évoque l’idée de bâtiment et de construction, ce style étant très utilisé dans l’architecture islamique.
- Style bannâ’i (façade et coupole), Imâmzâdeh Mohammad Mahrough, Neyshâbour.
Le mot ma’gheli se prononce aussi mo’aqqeli, faisant ainsi référence au fait que le calligraphe doit utiliser sa pensée et son intellect (’aql) pour tracer les lignes de façon appropriée. Si on le prononce ma’gheli, ce mot aurait alors une racine persane qui signifie "mur" ou "grand abri".
Le style bannâ’i ou ma’gheli a surtout été utilisé à l’époque seldjoukide pour décorer les bâtiments et en particulier les mosquées, puis à l’époque des Ilkhanides et des Timourides qui marquèrent le développement de la calligraphie en Iran. Ce style fut ensuite utilisé sur les différentes surfaces intérieures et extérieures des édifices religieux, ainsi que pour décorer les iwâns, les différents arcs, ainsi que les minarets. Ce style est encore utilisé actuellement dans l’architecture, l’artisanat, le graphisme… L’exemple le plus connu est "Allah Akbar" (Dieu est grand) que l’on trouve sur les bords du drapeau iranien. Parmi les exemples historiques les plus fameux de ce style, on peut évoquer la cour intérieure de la mosquée de Goharshâd à Mashhad, le tombeau de Sheikh Safi Ardebili à Ardebil, l’Imâm zâdeh Mahrough à Neyshâbour…
- Style bannâ’i sur les bordures du drapeau iranien, calligraphie de "Allah Akbar" (Dieu est grand).
Style naskh : ce style, créé au début du XIe siècle par Ibn Moghleh, était aussi célèbre que le fut le style coufique. Ce style était inspiré, entre autres, des écritures coptes et syriaques. Ce style se répandit et fut utilisé dans la majorité des pays islamiques. Il était notamment largement utilisé par les Iraniens pour recopier des manuscrits.
- Style naskh, page du Coran
Style sols (tholth) c’est l’un des styles le plus important de calligraphie qui fut créé par Ibn Moghleh au XIe siècle. La structure de ce style est statique et imposante. Le sols est surtout utilisé dans la décoration des livres et tablettes. En Iran, ce style est utilisé pour écrire le titre des sourates du Coran, les quatrièmes de couverture, ainsi que les tablettes ou les inscriptions sur de la céramique. Son utilisation demeure courante dans ce pays.
- Style sols, calligraphie d’Ibn Moghleh
Style mohaghagh : ce style fait partie des styles "brisés" (shekasteh) et fut systématisé par Ibn Moghleh. Certains calligraphes considèrent le style mohaghagh comme étant le père des styles de calligraphie islamique. Le mohaghagh est le style le plus proche de l’écriture coufique simple, où la forme des lettres est régulière et épaisse, avec des écarts réguliers et sans que les différentes lettres se recoupent les unes les autres.
- Style mohaghagh, sourate "Al-Nâs".
Style reyhân : ce style dérivé du style mohaghagh se caractérise par sa finesse et la petitesse de ses caractères. Il a toutes les caractéristiques du style mohaghagh mais est plus fin, c’est pour cela qu’il est comparé à la fleur et à la feuille de basilic (reyhân en persan). Ce style a été inventé notamment pour la facilité de son écriture et pour pouvoir être écrit plus rapidement que le mohaghagh.
- Style reyhân, page du Coran.
Style towghi’ : ce style de calligraphie islamique fut inventé à l’époque du calife abbasside Ma’moun et fut complété au XIIe siècle. Il est généralement utilisé pour les signatures, d’où son nom de towghi’ signifiant "l’action de signer" en arabe. On retrouve ce style dans les écrits gouvernementaux et religieux les plus importants. Du point de vue de la forme, il ressemble aux styles sols et reghâ’. Les lettres du style towghi’ sont cependant plus épaisses que celles du reghâ’, et ses courbes moins appuyées.
Style divâni : ce style de calligraphie islamique est utilisé de façon relativement courante dans les pays arabes. Il fut créé par Hessâm Roumi. Le divâni fut largement utilisé dans l’Empire ottoman, notamment sous le règne de l’empereur Soleymân 1er. On appelle aussi ce style "khafi" (caché) s’il est exempt d’ornementations et de vocalisation, et "jali" (apparent) s’il est accompagné d’ornementations et vocalisé. Calligraphier dans ce style demande beaucoup de temps et de patience.
- Style divâni, calligraphie de Kakayi.
Style reghâ’ : le reghâ’ fait partie des styles "cassés" (shekasteh) de calligraphie islamique. Il est avant tout utilisé pour les correspondances privées sur du papier de format réduit, ou encore pour écrire des livres ou des manuels non religieux.
Ce style était largement utilisé par les calligraphes ottomans. Le Sheikh Hamdollah al-Amâsi lui apporta certaines modifications et corrections au Xe siècle. Le reghâ’ fut ensuite simplifié par d’autres calligraphes pour ensuite devenir le style roq’eh, qui est l’un des styles les plus utilisés actuellement au sein des pays arabes. Ce style est une combinaison entre les styles naskh et sols et ressemble beaucoup au style towghi’, la seule différence étant l’épaisseur plus importante des lettres écrites en style towghi’. Le style reghâ’ était beaucoup utilisé par les scribes du fait de la possibilité de l’écrire rapidement ou encore pour la rédaction d’ouvrages non-religieux.
- Style sols et reqâ’, calligraphie de Hâji Maghsoud Tabrizi, XVIIIe siècle.
Style roq’eh : ce style se situe entre les styles naskh et divâni. Roq’eh signifie "joindre" ou "faire se rencontrer". Le roq’eh fut largement utilisé au sein de l’Empire ottoman, puis dans l’ensemble des pays musulmans où il demeure largement employé. Il y est surtout utilisé en tant qu’écriture cursive et standard, et à dans ce sens la même importance et place que le style nasta’ligh en Iran. Le style roq’eh est l’un des styles les plus faciles de calligraphie, dont la maîtrise permet également d’apprendre facilement le style divâni.
- Style roq’eh, sourate "Al-Qadr", calligraphie de Mohammad Ali Kâteb Gharavi.
Style toghrâ : c’est un style de calligraphie relativement compliqué que l’on utilisait pour écrire les noms et surnoms des sultans et princes sur les édits et lois au Moyen Orient. Les sultans ottomans ont plus particulièrement utilisé ce style pour leur signature. Le toghrâ est composé d’un assemblage de lignes verticales se terminant en arc entrant les uns dans les autres.
- Style toghrâ, signature de l’empereur ottoman Soltân Mahmoud II.
Style sini : ce style de calligraphie sino-islamique est parfois appelé "calligraphie islamique" du fait de la finesse de ses lignes. On trouve ce style avant tout dans les mosquées chinoises, et le plus fameux calligraphe de ce style fut Hâji Nouroddin Mey Gangdjiang.